La recherche dans le département STS s'appuie sur ses laboratoires, mais aussi sur ses plateformes. Afin de les faire connaître au plus grand nombre, le département STS a décidé de partir à la rencontre des acteurs qui les animent. Camille Ménard inaugure cette série d'interviews.
- Camille, pouvez-vous présenter le SCA ?
Le service commun des animaleries est une plateforme labellisée de l’université de Bordeaux rattachée au département STS.
Le SCA est composé de 45 personnes, réparties dans cinq animaleries situées sur les campus de Talence et de Carreire, un service administratif et financier et un service vétérinaire.
Comme toute plateforme, le SCA propose différentes prestations de service : il accueille les animaux et les projets de la communauté scientifique locale ou nationale, et d’entreprises privées.
Pour commencer, le SCA assure l'hébergement et le soin des animaux qui lui sont confiés (rats et souris), dans un environnement contrôlé et très réglementé.
Il propose également l’élevage de lignées de rats ou de souris par des équipes dédiées à cette activité. Celles-ci assurent la planification des élevages pour répondre aux besoins des équipes scientifiques et de leurs projets tout en garantissant la qualité génétique et sanitaire des animaux. Des animaleries expérimentales proposent, au-delà de l’hébergement, des soins et du suivi des animaux, différentes prestations (imagerie, analyses sanguines, irradiation) mais également la prise en charge de tout ou partie des projets expérimentaux (réalisation de mesures, de gestes techniques, de traitements) par les équipes du SCA, selon les besoins des utilisateurs.
Les équipes de recherche ont également la possibilité de faire cryoconserver des gamètes afin de sécuriser les lignées, et de pouvoir les échanger avec leurs collaborateurs du monde entier. Cette offre est cruciale pour le respect du principe des 3R "Remplacer-Réduire-Raffiner", car le maintien d’une lignée de souris ou de rats nécessite d’élever des animaux de façon continue alors que les projets se déroulent souvent de façon discontinue. Avec cette technique, il est possible de n’élever les animaux que quand c’est nécessaire, réduisant ainsi le nombre d’animaux élevés pour la recherche.
Ce domaine étant réglementé, toutes ces prestations se déroulent dans des animaleries disposant d’un agrément préfectoral, avec l’accompagnement de la structure chargée du bien-être des animaux et du service vétérinaire, par du personnel formé et habilité.
Aucun projet ne peut commencer sans avoir reçu un avis favorable par le comité d’éthique, et une autorisation délivrée par le ministère de la recherche.
Enfin le SCA assume des missions transversales au-delà des prestations qu’il propose dans ses 5 animaleries, en assurant notamment le suivi réglementaire et vétérinaire des autres animaleries de l’université, l’animation de formations réglementaires, le suivi des projets immobiliers, des financements, des marchés, …
- Quel est votre parcours et votre rôle au SCA ?
Après ma formation de vétérinaire, un master en neurosciences parcours recherche préclinique m'a formée aux exigences inhérentes au travail en animalerie de recherche. J'ai ensuite rejoint l'UB en 2015 après un an passé dans un élevage de lapins destinés à la recherche et à la production de sérum. J'ai d'ailleurs pu expliciter mon parcours dans une interview parue sur le site de l'université de Bordeaux.
Pour conclure, le bien-être est au cœur de mon engagement.
Vous décrire mon rôle au sein du SCA ? Les journées sont en fait très variées.
Le suivi réglementaire et l’accompagnement des responsables d’animalerie (du SCA et hors SCA) est une part importante de mon travail. Les aspects vétérinaires et sanitaires pour protéger le statut sanitaire de nos animaleries tout en permettant aux chercheurs de recevoir ou partager les lignées de souris utiles à leurs projets sont primordiaux. Les démarches administratives et réglementaires sont chronophages pour les transferts internationaux d’animaux.
L'une de mes responsabilités concerne l’amélioration continue du bien-être des animaux et du respect des 3R. Cette mission relève réglementairement de la structure chargée du bien-être des animaux de chacune des animaleries. Celle-ci rassemble des membres de l’équipe de zootechnie (dont des soigneurs et techniciens), des membres des équipes de recherche et les vétérinaires. Nous sommes 2 vétérinaires à l’université, et mon confrère assiste à la majorité de ces réunions. Je prends le relais quand il n’est pas disponible pour assurer la mission de conseil vétérinaire. J’ai pu constater une réelle évolution de ces SBEA qui rassemblent des personnes soucieuses du bien-être des animaux : entre 2015 et 2025, la compréhension de leurs missions, et leur prise en charge a beaucoup évolué, et ce sont désormais des acteurs incontournables au sein des animaleries, qui ont à cœur de conseiller, accompagner et faire progresser les pratiques en animalerie et au sein des projets de recherche.
Je suis également membre du Comité d'Éthique pour l'Expérimentation Animale de Bordeaux, comme de nombreuses autres personnes (soigneurs, techniciens, concepteurs, vétérinaires, et membres non spécialisés). Le comité émet un avis pour toute demande d’autorisation de projet ayant recours à des animaux au sein des animaleries de notre université.
Enfin, une responsabilité – et pas des moindres – nécessite vigilance et anticipation : celle qui concerne les infrastructures. L’électricité, les systèmes de ventilation, de chauffage et de climatisation et les alarmes associées doivent fonctionner en continu toute l’année. Il faut donc, avec les responsables d’animalerie, interagir avec les services de l’immobilier pour s’assurer de la maintenance des bâtiments, avec le PCSI pour s’assurer que les procédures en cas de dysfonctionnement sont connues et partagées, et bien connaitre les infrastructures pour préparer des plans d’urgence, en cas de dysfonctionnement critique. Il n’y a pas de place pour l’improvisation, tout dysfonctionnement potentiel doit avoir été anticipé.
Sans oublier évidemment tout ce qu’implique la direction du Service Commun des Animaleries, qui est passionnante, mais n’est pas le sujet ici !
- Qu'est-ce qui vous plaît dans vos missions ?
Pour faire court, je dirais que j'aime la polyvalence qu'impliquent les différentes responsabilités. Et plus que tout l’aspect collectif de ces différentes missions qui ont toutes du sens.
Pour conclure, le bien-être est au cœur de mon engagement.
Le bien-être pour les personnels, car leur travail est exigent sur le plan réglementaire d’abord mais également sur le plan éthique, l’attention est permanente. Prendre soin d'animaux destinés à un projet de recherche est parfois usant sur le plan émotionnel. La solidarité, la bienveillance et le développement des meilleures pratiques est donc essentielle.
La communication est également cruciale, car comprendre en quoi ces animaux dont ils prennent soin au quotidien sont utiles à la recherche, savoir quels sont les résultats des projets est essentiel pour donner du sens à leur travail.
Et bien-sûr le bien-être des animaux de laboratoire ! Leur bien-être au quotidien et pour les plus chanceux, la possibilité d'être adoptés.
- Adopter des animaux de laboratoire ?
Oui ! Nous avons l'autorisation de proposer à l'adoption les animaux lorsque l'expérimentation est terminée. Ainsi, chaque année, quelques centaines de poissons, des rats et des souris ont la chance de trouver une famille d'accueil. Le plus difficile est de trouver des adoptants. Peut-être la lecture de cet article suscitera-t-elle des vocations. Si c'est le cas, n'hésitez pas à contacter le SCA !
Légende Photo : Champ opératoire stérile, Crédits photos : Micaela Roque et Gautier Dufau (photo de une)
Interview réalisée en avril 2024 par Claudine Boiziau et Clémence Faure